Bretagne gourmande... Ma mamie mais mes crêpes !

C'est l'histoire d'une tradition qui se passe de mains en mains, d'oreilles en oreilles et d'expériences en expériences. Ce serait ainsi que je pourrais parler de ma recette de galette, transmise par ma grand-mère, quand j'étais étudiante et que je trouvais vraiment dégueu de réchauffer des galettes toutes faites dans la poêle. Tu peux me donner ta recette de galette, mamie ? Que je me lance. Parce que là, ça craint, je peux pas avoir ma dose hebdomadaire de galette depuis que j'habite loin. Tu mets de la farine de sarrasin, de l'eau et du gros sel et voilà. Et voilà ? Oui on est dans le pays Gallo, on ne met pas autre chose, pas de blé, pas de blanche, pas d'oeuf et n'en déplaise, elle est appelée galette et peut-être un peu plus épaisse. C'est bien celle avec laquelle on enrobe ici les saucisses grillées. De la farine de blé noir, de l'eau, du sel. Ok. Mais quelle quantité ? Oh je ne sais pas. C'est à l’œil. A l’œil, à l’œil... Pas de réponse, il fallait que je vienne voir. Et j'ai vu. Elle ne mesure rien, jamais. C'est à l’œil. J'ai fait pareil. Je me suis ratée plusieurs fois. J'ai pas battu à la main comme elle le fait, elle. Ma meilleure amie est une cuillère en bois, ma grand-mère continue de faire des galettes chaque semaine, et j'ai tenté d'élever mes enfants au lait ribot. Réussi à 50% de l'effectif. Mais moi non plus, maintenant, je n'ai pas de recette, je ne sais pas les quantités.

Je fais à la louche, à l’œil, à la sensation, à la texture. Et pour les crêpes ? A peu près pareil. Par contre, je n'ai pas pris la recette de ma grand-mère. Pas assez gourmande. Et beaucoup trop de rhum moi qui n'en tolère en la matière 0%. Trouver ma recette de la pâte à crêpe a été un tout autre chemin et il m'a fallu d'abord comprendre une chose. Ma grand-mère a appris à faire de la galette pour nourrir à moindre coût. La crêpe, farine de blé, lait, œufs, beurre, c'est de la gourmandise ! Et plus on la veut gourmande, plus on met d’œufs, plus on met de lait riche et de qualité. Plus on met de beurre...

Comment faire une bonne pâte à crêpe ? Avec de bons produits, avec de la gourmandise, une bonne rasade d'amour et beaucoup d’œufs! Je cuisine des galettes et des crêpes uniquement pour mon entourage proche (sinon je rate). Et je cuisine chacune d'entre elles comme si j'allais la manger. Sinon je rate aussi. Alors du coup, je cuisine en direct, comme au restaurant. Je ne sais pas faire des piles de crêpes pour la kermesse de l'école, le pique-nique de demain, le goûter de samedi. Tant pis.
Et je conserve le défaut ancré probablement dans mon génotype. Je ne mesure pas. Sauf que si vous venez ici c'est pour le dosage.

Je suis partisane de la formule riche ayant pour base 500g de farine / 6 œufs / 1 litre de lait. Plus on met d’œufs et plus la pâte est savoureuse. C'est vraiment là que se situe la différence selon moi entre une pâte à crêpe gourmande et une pâte à crêpes chiche... En comparant les recettes proposées dans les livres de cuisine, on voit souvent 3 œufs pour la même quantité de lait et de farine.
De mon côté pas d'alcool mais de la vanille, en extrait et en gousse si possible. De la cassonade ou du sucre roux à défaut (je n'aime pas trop le sucre blanc), je n'aime pas trop non plus que la pâte soit trop sucrée. Du sel, en pincée et en beurre.

Et pour la recette du jour, j'ai ajouté pour la première fois, sur les conseils d'un homme bien plus gourmand que moi, du zeste de citron (bio, inutile de le préciser ?), optionnel bien entendu.
Ma petite astuce tambouille supplémentaire, du beurre (salé, hein, sinon c'est pas du beurre) à peine fondu, ajouté au moment de la cuisine, après un repos (de la pâte) bien mérité. A la première crêpe, on peut aussi rectifier le tir en ajoutant du lait pour plus de légèreté... Et puis après, c'est que du bonheur des papilles, du craquant au beurre et aux ingrédients variés pour la fourrer. J'ai d'ailleurs une pensée particulièrement intéressée pour ma copine Valkikou qui fait un caramel à tomber et qui se marie parfaitement avec ma façon de voir les crêpes (et de les cuisiner). 
Aujourd'hui, nous avons fait une battle de pâtes à crêpes entre copines, et c'était sacrément gourmand ! J'en profite pour faire un gros bisou à la vanille à chacune de mes farouches concurrentes et à chacun des enfants à la gourmandise héritée et puis merci Mère F. pour la leçon de krampouze !

Je ne vous laisse pas sans un livre à vous mettre sous la dent. 
Mamie Pik de Hubert Rublon. Réalisé par Hubert Roublon, artiste peintre à Saint-Malo et ancre son travail en Bretagne, il est notamment l'auteur de Papy Pêchou et fait de cette Mamie Pik la version féminine ronde et généreuse, à très haute coiffe... Bigoudène ! Pas de temps pour la paresse pour Mamie Pik qui "Dès potron-minet (...) ouvre ses volets". Elle est déjà coiffée et file direction le poulailler pour nourrir ses poules, file au jardin, lit son petit journal en attendant l'arrivée de ses copines bien ancrées elles aussi dans la tradition dont l'auteur en pince tout en en riant avec bienveillance. Une histoire saupoudrée de petits mots bretons, de cuisine, d'animaux, de météo locale, de langage fleuri et d'une bonne tournée de crêpes !  Les peintures en illustrations s'attachent à représenter la tradition avec couleurs chaudes et énergie.

*** Les références ***

* Mamie Pik de Hubert Rublon - Editions Locus Solus -  octobre 2014 - 11,90 € - à partir de 4 ans