mercredi 19 août 2015

Respecter l'environnement, jardiner, regarder demain

Une petite graine, plusieurs, un champ, des pousses, plusieurs, un massif, des arbres, le ciel, le vent, les nuages qui passent, plus ou moins sombres, plus ou moins clairs, plus ou moins épais, denses, dansent au-dessus de nos tête et parfois le temps s'arrête. Et parfois la gorge se serre. Quand on voit que finalement il ne s'est pas arrêté, le temps. Quand on voit que finalement de ces petites graines qui ont germé, on peut déjà cueillir une fleur, couper des feuille, récolter des graines. Et on puis on enlève le "déjà". De ce petites graines qui ont germé, on engrange des graines, et sait déjà qu'on les sèmera l'année prochaine. Et pour libérer cette gorge qui se serre, il faut élever le regard, le pointer vers l'horizon. Faire entrer fort l'air dans les poumons. L'air y entre,  plus ou moins froid, plus ou moins vite et la vie reprend son cours et la tasse bue est déjà loin, loin, loin. Et le goût de sel que ses rivières qui coulent des yeux à la langue, du nez aux lèvres, ont laissé sur mon visage sont déjà loin, loin, loin derrière. Et alors vient l'envie de soleil sur les joues, de brise sur le nez, de fruits tièdes et sucrés cueillis sur l'arbre, de fleurs odorantes, de couleurs en bouquet dans la main. Et alors vient l'envie d'écrire demain et d'arrêter de raturer sur les lignes, d'arrêter de reculer, c'est pas tout à fait vrai que c'est pour mieux sauter, et alors vient l'envie de reprendre la route. Revient l'envie enfouie. Même si l'on ne sait pas où elle mènera. La route. C'est elle le doute. Mais pour pouvoir revenir au vrai, revenir à la nature, il faut en prendre soin, pour faire pousser, permettre de pouvoir le faire, préserver, protéger, pour donner.
Le parc de Marguerite de Sara Stefanini. "Marguerite allait toute seule au parc. Elle restait là, assise pendant des heures et regardait autour d'elle". Les feuilles, les arbres, bien sûr, elle collectionnait les sensations aussi, "elle s'amusait à observer les ressemblances entre les chiens et leurs maîtres". Puis elle rentrait chez elle où sa maman l'attendait, "allongée dans son lit tiède". Puis elle offrait à sa maman à qui cette promenade au parc manquait tant, les descriptions, le souvenir des sensations, sans omettre bien entendu de parler de ce qui les amusait toutes les deux : les ressemblances entre les chiens et leurs maîtres. Elle savait que cela ne suffisait pas, le parc manquait tellement à sa maman... C'est ainsi qu'elle a eu une fabuleuse idée : rapporter le parc à la maison. Ou plutôt le recréer. Un petit seau d'abord, et un autre encore le lendemain, un petit seau de plus le surlendemain et ainsi de suite... Puis "Marguerite se mit à creuser et à semer. Les graines germèrent , des pousses apparurent et bientôt des arbres". C'est ainsi que pour sa maman, l'enfant réalise des merveilles, c'est ainsi qu'un bois touffu apparaît dans le grenier et s'étend dans toute la maison, c'est ainsi que les gens commencent à venir se promener dans cette drôle de maison où tout a germé, jailli par amour. C'est ainsi que l'amour et le soutien permettent de résister à la maladie, à la faiblesse, à la déprime. C'est ainsi que la vie prend, et reprend, qu'elle continue, sa résistance. Un parc fait maison pour dépasser la maladie, hymne à l'amour filial dans ce livre au texte pur et poétique, aux illustrations sobres, tendres, fines, délicieusement naïves, délicieusement irrespectueuses des normes, des lignes d'horizon et des proportions.
Fragile d'Agnès Domergue et Lydie Sabourin. Dans cet univers gris, de collages, découpage, aquarelle, crayon, papier mouillé, froissé, séché, naît un texte philosophique basé sur un échange entre un enfant et un vieille homme. "Fragile". Fragile est la Terre, ses déserts, ses mers, ses montagnes... Le vieille homme regarde derrière lui, ces fois où il s'est senti plus fort que la Terre, plus grand, ces fois où il l'a salie, tâchée, meurtrie : déforestation, pollution de la terre, des océans, réchauffement de la planète.. Il en est responsable. Pleurs. Peut-il revenir en arrière ? Peut-on nettoyer les océans, recoudre le ciel ? Quel avenir, quelle vie pour les plus jeunes ? "Il ne faut pas pleurer. Regarde, la Terre est encore belle" dit l'enfant qui regarde le présent maintenant, et demain , à travers, de manière inconsciente, un enfant qui dessine des fleurs, des abeilles... Ensemble, avec des craies de toutes les couleurs, ils dessinent un arc-en-ciel, une hirondelle, réparer pour le vieil homme, construire coloré, respectueux, pour l'enfant. Des oiseaux colorés envahissent le papier gris et froissé, l'aquarelle fait renaître dans une double page pleine d'espoir, l'optimisme teinté pourtant de fragilité. En finesse et avec beaucoup de délicatesse et d'émotions, Agnès Domergue parle de la nature, de pollutions, sans dogmatisme, sans concession non plus quand il s'agit de dire, mais avec l'espoir de la transmission du respect et cet optimisme virulent qui dit, crie, écrit, qu'il n'est pas trop tard. Les illustrations de Lydie Sabourin font un fort écho au texte construit sous forme d'un dialogue théâtral. Un petit ours blanc au milieu d'un océan de noir, mazout ; l'atmosphère déchirée, rompue, broyée, quand il s'agit d'aller explorer l'univers, la lune, les planètes ; les regards perdus des animaux des forêts, chassés par le feu, l'abattage des arbres... un album remarquable et émouvant qui traite de manière originale et marquante de pollution et d'écologie.
La planète, mon p'tit monde et moi du collectif Okido. Dans cet ouvrage pratique, riche, ludique et intelligent, l'enfant découvre le monde dans ce qu'il lui est le plus près (lui et sa famille), en prenant peu à peu de la distance : chez lui, son jardin tout d'abord. Puis il  partira au-delà en découvrant la campagne, la ville, les fleuves et les rivières, la mer, la forêt, les montagnes. Un petit pas plus loin encore que son petit monde à lui, que son petit nombril autour quoi tout tourne, il y a aussi les saisons, une planète d'animaux, le jour et la nuit, l'espace même ! L'ensemble se déroule comme une grande aventure dont l'enfant est le héros, dans un livre qui propose de belles promenades, des réflexions sur l'ouverture aux autres et au monde, des activités en sont vecteurs ; les consignes s'adressent directement à l'enfant d'ailleurs pour l'impliquer dès le départ. Découpage de silhouettes pour représenter la famille, analyse d'une assiette et origine des aliments, cuisine, espace maison, exploration du jardin et création d'un mini-jardin en pot, petit jeu de l'oie, apprendre à se repérer sur un plan et à lire des légendes, explication de la formation et de la vie des rivières, fabrication d'un petit bateau avec une brique de jus de fruit, récolte de trésors et petits jeux en forêt, la naissance d'une île, création d'une lune en biscuit ! Un livre pour lutter intelligemment contre l'ennui, pour apprendre et s'ouvrir surtout ! Dense, inspirant et forcément inépuisable !

S'il n'y a pas vraiment de manuel pour apprendre à respecter Terre, nature et humanité, s'il ne devrait pas y avoir besoin de demander aux gens de ne pas cueillir des fleurs des dunes, de ne pas ramasser de palourdes trop petites, de ne pas jeter leurs déchets par terre, de trier, de passer à la déchetterie régulièrement, de recycler, de donner une nouvelle vie, s'il n'y a pas de manuel pour dire qu'il faut donner la main, aider, soutenir les migrants qui quittent l'atroce pour ici, en espérant mieux, se noient, meurent ou vivent et se font enfermer dans des zoos. S'il n'y a pas de manuel pour demander à ses voisins de respecter l'environnement, le collectif, pour faire moins de bruit la nuit, pour indiquer qu'il faut ramasser les mégots qui jonchent notre escalier commun, et qu'il faut arrêter de les jeter par terre, il y a par contre quelques livres très bien faits pour apprendre à jardiner, à regarder, à observer, à prendre le temps de semer et de regarder pousser... par exemple :
J'apprends à jardiner d'Emily Bone et Abigail Wheatley, illustrations Lisa Dejohn. Ce petit livre à spirale, très coloré propose un contenu dense et expliqué pas à pas pour se lancer facilement dans le jardinage et créé son petit parc chez soi comme Marguerite ou son petit potager à fruits, à fleurs et à bestioles, sur un vrai terrain ou un petit balcon. Au menu, le matériel, les conseils pour bien commencer et réussir ses plantations (arroser, nourrir, éclaircir, diviser, planter au bon endroit...), écarter les ravageurs (pucerons, chats, altises...). Le manuel explique aussi comment jardiner en pot, ce que l'on peut planter. Capucines à regarder ou à manger, bulbes à admirer et à sentir, salade à couper et à croquer, tomates et fraises à laisser rougir et à déguster, fines herbes aussi. Pour les plus passionnés, on parle aussi de bouturage, de créer une mini-mare... Pour les moins acharnés, de plantes faciles à entretenir comme les succulentes... Facile et accessible, c'est un ouvrage très familial pour les débutants en la matière !
Et pour aider les plus petits à observer tout en s'amusant Le jardin dans la collection Autocollants d'Usborne. Que trouve-t-on au jardin ? Des fleurs - marguerites, roses trémières, coquelicots, alliums... -, des fruits et leurs arbres bien sûr, des légumes mais aussi des insectes et des petites bêtes de toutes sortes, des petits animaux et du matériel bien entendu ! On se rend aussi tout en autocollant à la mare, ou dans le jardin mais tard le soir ! Un petit livret gai et coloré.




*** Les références ***
Le parc de Marguerite de Sara Stefanini- Editions Notari -  3e trimestre 2014 - 17 € - à partir de 4 ans
 Fragile  d'Agnès Domergue et Lydie Sabourin - Editions Philomèle -  2015 - 15,80 € - à partir de 4 ans
 La planète, mon p'tit monde et moi  d'Okido, studio de création de média jeunesse - Editions Bayard jeunesse -  juin 2013 - 14,50 € - à partir de 4 ans
 J'apprends à jardiner  d'Emily Bone et Abigail Wheatley, illustrations Lisa Dejohn - Editions Usborne -  2015 - 10 € - à partir de 5 ans - familial
 Le jardin  de Caroline Young, Benedetta Giaufret & Enrica Rusina - Editions Usborne -  2015 - 4,95 € - à partir de 3 ans

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